Témoignage de Madame Reinette GIRARD
Sommaire
1. Présentation de Madame Reinette GIRARD
2. Capsule d'entretien n° 1 : Une impasse identitaire
3. Capsule d'entretien n° 2 : La langue perdue
4. Capsule d'entretien n° 3 : Française de culture kabyle
5. Son témoignage intégral
6. Fiche descriptive de l'entretien
1. Présentation de Madame Reinette GIRARD
Reinette Girard est née dans le sud de la France en 1970, dans le hameau de forestage de Collobrières. Elle est la dernière des filles d'une famille de 9 enfants. Son père a été emprisonné de 1962 à 1968 en Algérie avant de pouvoir regagner la France avec sa famille.
J'ai rencontré Reinette lors d’une présentation publique de son livre autobiographique La petite fille de la forêt. Elle témoigne de son parcours thérapeutique, qui l’a amenée à exercer elle-même depuis 2019, comme psychanalyste. Pour cet entretien elle me reçoit en février 2023 dans son cabinet à Marseille.
Pour découvrir son récit, dans un premier temps, écoutez les 3 extraits significatifs ci-après :
2. Une impasse identitaire
3. La langue perdue
4. Française de culture kabyle
dans un second temps, retrouvez ces extraits dans :
5. Son témoignage intégral, ci-après...
6. Grille descriptive de l'entretien de Reinette GIRARD
Projet de référence Collecte de témoignages de femmes, filles ou épouses de harkis
1 Nom du/des témoins ou situation d'enregistrement Reinette Girard
Date 05/02/2024
Lieu Marseille
Nom du collecteur Caroline Fontana
2) L’enregistrement
Support :
support audio oui
support audiovisuel non
Format (wave, dvcam…) wav
Qualité bonne
Matériel utilisé :
Enregistreur Tascam
Durée de l’enregistrement 1 heure 44 minutes
3) Le document produit
Nom du document Reinette Girard Entretien.mp3
Format du document MP3
Durée du document 1 heure 35 minutes
4) Le contenu documentaire
Données biographiques et contextuelles
Reinette est née dans le sud de la France en 1970, près de Hyères, dans le hameau de forestage de Collobrières. Elle est la dernière des filles d'une famille de 9 enfants. Son père a été emprisonné de 1962 à 1968 en Algérie avant de pouvoir regagner la France avec sa femme et ses enfants. Ils ont coupé définitivement avec leurs familles algériennes.
Introduction à l'enquête
J'ai rencontré Reinette l lors d'une intervention qu'elle a faite à Valence pour présenter son livre La petite fille de la forêt. C'est Colette Petrod Zerrouki pour AJIR qui organisait l'événement qui m’a permis de la rencontrer. J’ai rapidement fixé un rendez-vous avec elle ainsi qu’avec Nora Forte à Aix, pour les rencontrer la première semaine de février. Elle exerce comme psychanalyste depuis 2019. Elle m’a reçue dans son cabinet dans le centre de Marseille.
Description thématique
00:00 Présentation / les lieux de l’enfance/ les souvenirs du hameau /
2:46 souvenir traumatisant/scène de violence refoulée /Elle évoque le décalage entre l'innocence de l’enfance d’un côté et de l’autre la violence et le stress que portaient les personnes dans le camps suite aux traumatismes qu’elles avaient subi. (6:00)
07:04 La vie dans dans le hameau, les liens entre familles/ le retour récent sur les lieux
7:00 "Après-coup, ce qui me revient, c'est comme si mes parents n'étaient pas des adultes, ils ont été infantilisés."
11:20 Retour récent au hameau avec son mari.
12:00 Le contraste entre regard de l'adulte et souvenirs de l'enfance. "C'est à l'âge adulte qu'on mesure". L'isolement, l'entre-soi, la précarité.
14:10 Description de la famille / L'histoire du père et son emprisonnement en Algérie
14'40 Sur l'emprisonnement des harkis après les accords d'Evian
15' L'indicible, la violence vécue par son père / Le silence comme un moyen de survie. "Mode survie, mode adaptation" de ceux qui ont vécu la guerre (ses parents, ses grands frères et soeurs) et portent des traumatismes.
17:30 L'école/la langue Kabyle qu'elle perd/ les liens entre familles dans le camp et avec les personnes du village/ "Il fallait choisir une langue. Ne parlant plus la langue, j'ai perdu le lien."
21:25 : "Je me souviens qu'on nous regardait", sur le chemin de l'école.
22:59 "Mon histoire je ne la connais qu'en pointillés"/Déconnection avec son histoire et celle des harkis pendant longtemps 24:59 Comment les traumatismes s’inscrivent dans les corps.(travail avec un psychosomaticien)
28:00 La place des femmes, des mères, dans le hameau.
28:55 Départ du camps et arrivée de la famille à Brignoles en HLM/ Confrontation au monde extérieur/Les questions, les incompréhensions qui perdurent
Le camp comme un milieu préservé, malgré la précarité. Dureté de l'arrivée en HLM à Brignoles, pour les parents, pour les mères, et pour les enfants. Elle est confrontée à des informations qu'elle ne comprend pas. Entend dire que les Harkis sont des traitres. « je pensais que c'était une race". 31:00 Dans le camps "on était tous pareil", à l'extérieur les familles sont confrontées à la différence.
Sur l’alcoolisme du père.
35:00 L’Indicible, les silences, les questions restées longtemps sans réponses.
37:00 « On ne peut rien demander à un parent qui a vécu quelque chose comme ça, en même temps, en tant qu'enfant on a envie de demander des choses, parce qu'on le ressent."
38' le racisme qu'elle vit encore aujourd'hui /Le manque de reconnaissance, de parole, à l'échelle du pays
"On n'en a jamais parlé mais c'était une guerre civile et tout ça, ça reste."
40'28 Elle me rapporte hors enregistrement deux situations d’injures racistes subies par l'une de ses soeurs et par un de ses collègues, fils de harki. 42:20 « Par les questions qu'on vous pose, vous entendez quoi? qu'on n'est pas français. »
Reinette considère que le travail qui consiste à poser des mots sur ce qui s'est passé, sur les différentes trajectoires, ne s'est pas fait comme il a été fait par exemple pour l'Allemagne après la seconde guerre mondiale (44:14)
45:50 Incidences de la maltraitance des parents sur leurs enfants.
47:00 »j’ai 53 ans, je suis née ici et encore aujourd'hui, "ça plane".
51:00 Retour sur son parcours après le hameau / la double culture/la difficulté pour les filles/son parcours en psychanalyse Redoublement à l'arrivée à Brignoles (CE2)
HLM = contexte d’une population mélangée dans les années 80 . "Les guettos, ça a commencé après"
Difficulté d'être française avec une culture kabyle. 53:00 Son père pendant longtemps a gardé la culture Kabyle traditionnelle, très rigide pour les filles, culture entretenue par les harkis pendant les 7 années dans le hameau. C'est en sortant et en étant confronté à la réalité de la vie en France qu'il a évolué. 55:30 « c’était compliqué d’être une fille.
55:57 Parcours avec la psychanalyse/ Impact des souffrances sur les relations familiales.
57:08 Regards sur la souffrance de son père. Son histoire. Son silence
58:00 Alcoolisme du père. Honte.
59:40 Tensions dans le couple. Les femmes reprochent aux maris leurs situations. "Elles se retrouvaient impuissantes". Coupure avec la famille en Algérie
61:30 Ses parents n'ont jamais renoué le contact avec leurs familles.
62:11 Les silences, les questions sans réponse."Comme si c'était trop tard".
63:30 « Du fait de la langue, je n'étais pas assez proche ».
64:00 Etudes à Aix/elle quitte le foyer / la honte que portent les enfants/Les questions identitaires
Son père la laisse partir. Elle devient interne à ce moment-là et quitte le foyer familial.
"Pendant longtemps c'était comme si cette histoire n'avait jamais existé. Et puis ça rattrape. »
"Je portais la honte de mon père".
67:29 Etudes de sociologie. Les questions identitaires. Définir qui on est.
70:20 Dépression qu’elle a traversée. Référence au livre d’Amin Maalouf, les identités meurtrières.
73:20 Question d'un potentiel voyage en Algérie
Elle a peur et n'a pas envie d'y aller.
74:50 Rencontres avec des enfants de harkis pour son mémoire en sociologie
Racisme, manque de reconnaissance, familles éclatées : témoignage de ce qu’elle a entendu, perçu.
77:35 Sur l'intérêt suscité par son livre et son expérience de thérapie lors de son intervention à Valence
Impact du transgénérationnel. Rage, colère de pas y arriver portée par les enfants. Revendication d’amour, d’acceptation, peur du rejet. Impasse identitaire. Responsabilité politique de cette situation qui crée des dysfonctionnements.
83:20 « C’est très dur de voir un père à plat »
Insécurité permanente connue par ses parents.
89:50 Sur son métier de psychanalyste
93:56 Sur ses frères et soeurs (écart de 20 ans avec les aînés) qui ont grandi sans son père alors qu’il était emprisonné 95:10 dernière question sur les livres autobiographiques qu’elle a écrits, qui ne concernent pas seulement son histoire familiale
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